La nouvelle politique étrangère américaine, sous l’impulsion de son nouveau président, Barack Obama, s’affirme beaucoup plus multilatérale. Lors de son voyage en Asie, la secrétaire d’état américaine, Hillary Clinton, a ainsi réaffirmé sa préférence pour une approche multilatérale, surtout pour faire face à des défis globaux comme le changement climatique et la crise économique.
Il est donc fort tentant de voir dans cette nouvelle administration la fin de l’unilatéralisme américain. Après tout, le « moment unipolaire » dont parlait Charles Krauthammer en 1990, au sortir de la Guerre Froide, n’est-il pas bel et bien fini ? Le monde d’aujourd’hui n’est-il pas multipolaire, avec l’émergence des BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine), mais aussi l’affirmation de l’Union Européenne comme acteur global, et la montée en puissance d’acteurs non-étatiques (telles que les multinationales, mais aussi al-Qaïda) ?
Certes, les Etats-Unis ne peuvent plus jouer seul sur le grand échiquier mondial. Mais ils ont toujours un très net avantage sur les autres puissances, que ce soit en terme de ‘hard power’ (puissance militaire) ou de ‘soft power’ (puissance culturelle et économique), même si cet avantage relatif tend à diminuer lentement. Les Etats-Unis se sont d’ailleurs déjà adaptés en développant leur ‘smart power’ (c’est-à-dire un mélange de hard et de soft power).
Ce changement de structure globale ne signifie cependant pas pour autant un glissement automatique de l’unilatéralisme (qui n’est par ailleurs pas inhérent à l’unipolarité) vers le multilatéralisme. On l’a vu sous l’ère de George W. Bush. Il faut donc une véritable volonté politique pour vaincre la tentation unilatérale et se tourner vers le multilatéralisme. C’est ce qu’Obama semble vouloir faire.
Nous entrons aujourd’hui dans un « moment multilatéral ». Le terme « moment » est ici important car il est possible que ce multilatéralisme ne dure pas. Soit parce que le prochain Président américain peut revenir à l’unilatéralisme, soit parce qu’Obama lui-même peut encore parfois se laisser tenter par l’unilatéralisme, notamment lorsqu’il a proposé un plan de relance « buy American » (achetez américain) très protectionniste. En outre, il est possible que la crise économique mondiale repositionne les pions sur l’échiquier global et que les équilibres géostratégiques en sortent bouleversés.
Il est donc important que l’Union Européenne saisisse ce « moment multilatéral », non seulement pour avancer son propre agenda multilatéral, mais aussi pour renforcer les Etats-Unis dans cette approche et façonner ensemble un système de gouvernance mondiale efficace, à notre image, et adapté à la nouvelle structure globale et aux nouveaux défis. L’aiguille du temps trotte. Le moment multilatéral ne sera pas éternel. L’UE pourrait commencer par rassurer son allié outre-atlantique lors du sommet de l’OTAN…
Cet article est crossposté sur le site Alliance Géostratégique.
«Rien n'est plus facile que de dénoncer un malfaiteur; rien n'est plus difficile que de le comprendre»
---Fédor Dostoïevski
lundi 16 mars 2009
Saisir le "Moment Multilatéral"
Publié par Europe in the World à 13:22
Libellés : Etats-Unis, Europe
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