1,000 roupies par jour, soit 6 euros. C'est la somme qu'offrent les Taliban à quiconque veut rejoindre le jihad afghan/pakistanais. Pour les kamikazes, la prime est encore plus attrayante: 80 euros. Une belle somme dans un pays dont l'économie locale est complètement ravagée par la guerre. En outre, rapporte Arnaud de Borchgrave pour UPI, les Taliban conduisent de nombreux raids dans les régions tribales pakistanaises, se livrant à des activités de pillage et de kidnapping contre rançons.
Il s'agit là d'une dérive observée dans plusieurs autres groupes: l'évolution vers une forme de terrorisme à but lucratif. Dans un article intitulé "For-Profit Terrorism: The Rise of Armed Entrepreneurs", publié dans Studies in Conflict and Terrorism, Justine Rosenthal décrit cette tendance:
The illicit economy is on the rise. Counterfeit goods, drugs, people, and information all flow easily across increasingly porous borders. This has led to three growing phenomena: high-end criminals; the criminal state; and of particular concern in the face of a growing global insurgency, for-profit terrorists. These violent actors are groups that were originally ideologically motivated but now use this political rhetoric only to recruit and gain legitimacy; their real purpose is a bigger bottom line. For-profit terrorism is a burgeoning, but under-the-radar trend.
(…)
These terrorists are able to increase their ranks both because enrollment in the “cause” has ideological appeal and also because participation often provides a better standard of living than subsistence farming or any of the other legal economic opportunities out there—if there are any at all. Although there is much debate as to linkages between poverty and terrorism,62 low standards of living and unemployment play a predominant role in population control and recruitment because profiteering terrorists’ modus operandi involve the accumulation of wealth. When one considers that the way these groups thrive is by offering better earnings to the downtrodden, it is hard to ignore the need to raise the standard of living in some of the states that breed these terrorists. It is not, of course, a panacea. But if there is any real political grievance associated with for-profit terrorism it is the rampant poverty of much of the population.
Cette tendance vers le terrorisme lucratif renforce également la complexité du débat sur le lien entre pauvreté et terrorisme, dont j'ai déjà parlé dans ce blog. En effet, déjà sous une forme "non-lucrative", de nombreux groupes rémunèrent leurs membres, ce qui pousse certains individus marginalisés à joindre le groupe. En outre, pour de multiples raisons, le terrorisme peut parfois proliférer plus facilement dans des milieux défavorisés, comme au Maroc, où la plupart des réseaux islamistes sont profondément ancrés dans les bidonvilles.
Dès lors, dans sa forme "lucrative", le terrorisme peut exploiter encore davantage la pauvreté et les inégalités économiques pour recruter de nouveaux membres.
Tout ceci ne veut pas dire pour autant qu'il faille automatiquement connecter terrorisme et pauvreté. En fait, comme déjà souligné précédemment, le lien est complexe et indirect. Cependant, lorsqu'un groupe évolue vers une forme "lucrative", les causes économiques peuvent devenir de plus en plus importantes dans la stratégie contre-terroriste. L'évolution de l'insurrection talibane devrait être suivie de près à ce niveau.
1 commentaire:
Le fait est que l'homme (et la femme) ont beau avoir des idéologies pour quelque chose, des haines contre autre ou autres sentiments, il faut d'abord remplir son estomac avant de parler philosophie et passer à l'action.
Et les pays ''riches'' peuvent jouer la dessus pour ''couler'' l'ennemi sous une pluies de devises, comme pour les déserteurs des FARC :)
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