Le nombre d'attentats commis par des femmes en Irak est en nette augmentation. Cette année, les femmes kamikazes ont déjà tué 140 Irakiens. L'utilisation de femmes par al-Qaïda en Irak (AQI) - qui est présumé responsable pour ces attaques - indique un changement à de multiples niveaux.
Premièrement, il s'agit d'un changement de mentalités. En effet, l'idéologie radicale prônée par al-Qaïda ne laisse généralement qu'un rôle secondaire aux femmes. Cependant, la tendance est en train de se modifier en Irak, mais aussi globalement. L'une des raisons de cette évolution tient dans ce que les terroristes eux-mêmes appellent la "jurisprudence" islamique. La tactique ayant été utilisée dans le passé et approuvée par les instances supérieures, elle peut être reproduite à volonté.
Deuxièmement, il s'agit d'un changement tactique. La perte de "sanctuaires" et les progrès américains ont repoussé AQI du pôle guérilla vers le pôle terrorisme. Avec la perte de leur soutien populaire, les membres d'AQI ont été obligés d'adapter leurs tactiques afin de poursuivre leur double objectif (combattre les Américains, et prendre le contrôle de l'Irak). Les attaques terroristes contre les militaires américains permettent de faire un maximum de dégâts avec un minimum de moyens (un kamikaze et une bombe); alors que les attaques contre les civils irakiens permettent de créer le chaos, dans l'espoir de délégitimiser les autorités locales. En outre, les dernières attaques spectaculaires visent à rétablir "l'image de marque" d'AQI, quelque peu ternie par plusieurs échecs successifs. Dès lors, l'utilisation de femmes-kamikazes s'inscrit dans ce changement tactique: les femmes sont moins suspectées par les forces de sécurité et peuvent cacher plus facilement une bombe sous leurs vêtements, et donc maximiser les "dégâts". En plus, l'utilisation nouvelle des femmes renforce la terreur au sein de la population qui doit désormais se méfier de tout le monde.
Troisièmement, il est possible que l'utilisation des femmes soit révélateur du déclin d'AQI. Cela n'est pas certain, mais plusieurs signes indiquent qu'AQI a de plus en plus de difficultés à recruter de nouveaux membres et, donc, les femmes seraient utilisées comme "substitut".
Quatrièmement, il est probable que le nombre de femmes candidates au suicide soit relativement élevé, mais qu'elles aient été négligées par AQI jusqu'à présent. En Irak, la relation mère-fils étant extrêmement puissante, la vengeance de la mort d'un fils joue un rôle important dans la décision de prendre part à un attentat-suicide. Cette même notion de vengeance a déjà été observée, par exemple, en Tchétchénie ou en Palestine . Notons que la vengeance est un facteur très important dans la décision d'un individu de rejoindre un groupe terroriste, quel que soit le sexe.
Enfin, le potentiel de femmes kamikazes irakiennes permet à AQI "d'irakiser" davantage le groupe. En effet, les kamikazes d'AQI sont en grande majorité des hommes étrangers. Et, pour repasser vers le pôle guérilla, AQI a besoin de reconquérir la population irakienne.
«Rien n'est plus facile que de dénoncer un malfaiteur; rien n'est plus difficile que de le comprendre»
---Fédor Dostoïevski
lundi 24 mars 2008
Femmes et Jihad (1)
Publié par Europe in the World à 22:47
Libellés : Al-Qaïda, Insurrection, Irak, Terrorisme
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