«Rien n'est plus facile que de dénoncer un malfaiteur; rien n'est plus difficile que de le comprendre» ---Fédor Dostoïevski

mardi 19 février 2008

Quelques Enseignements du Procès de la Cellule de Birmingham

Parviz Khan a été condamné lundi à la prison à vie par la Court de Leicester, en Angleterre. Il a été jugé coupable de tentative de kidnapping d’un soldat britannique dans le but de le tuer et de diffuser la vidéo de l’exécution sur l’internet. Le plan aurait dû avoir lieu en janvier 2007 à Birmingham, une grande ville du centre de la Grande-Bretagne. Parviz Khan était le leader d’une cellule terroriste basée à Birmingham. Quatre autres individus ont été jugés coupables d’appartenir à la ‘cellule de Birmingham’ qui, en plus de la planification d’une exécution, envoyait du matériel aux terroristes présents dans la région frontalière entre l’Afghanistan et le Pakistan.

Sans analyser en détail le procès, je voudrais souligner plusieurs éléments mis en évidence dans cette affaire. En premier lieu, l’histoire des différents condamnés confirme que le jihadisme n’est pas le fruit d’une radicalisation progressive d’un individu, mais plutôt le résultat d’une radicalisation par ‘chocs’. Parviz Khan n’est devenu un islamiste fanatique que très tard, dans la trentaine, après plusieurs voyages successifs au Pakistan. Auparavant, il n’était pas musulman pratiquant. Selon plusieurs témoignages, le jeune Khan aimait l’alcool, les cigarettes et les boîtes de nuit. L’Islam lui importait peu. Jusqu’à ses visites au Pakistan. Beaucoup de facteurs peuvent jouer la fonction de ‘choc’ : la mort d’un proche, la vision de certaines images (type abu-Ghraib), etc. Parfois, de manière surprenante, la religion n’est même pas un facteur clé dans la décision d’un individu de s’engager dans le terrorisme. Zahoor Iqbal, l’un des membres de la cellule de Birmingham, était connu comme étant un musulman modéré, pas un fanatique. D’autres motifs que la religion l’ont poussé à se joindre à Parviz Khan.

Deuxièmement, le plan élaboré par Khan montre une diversification des techniques jihadistes en Europe. D’abord au niveau de la stratégie, l’enlèvement et l’assassinat marquent une différence significative avec les attaques à la bombe, sur le modèle de Madrid ou de Londres. Ce type d’opération semble inspiré par ce qui se passe en Irak notamment. Cela indique un puissant effet de ‘contagion’ des techniques jihadistes. Les terroristes ont sans doute été influencés par les vidéos diffusées sur internet. En outre, en ciblant spécifiquement les militaires plutôt que la population civile, les terroristes démontent l’intérêt qu’ils portent à leur propre image. Ils tentent de renforcer le caractère ‘légitime’ de leur guerre. Ensuite, il y a également une diversification au niveau de la mise en scène. Les kamikazes de Londres avaient laissé des confessions sur vidéo. Mais en filmant l’exécution et en diffusant la vidéo sur internet, Khan aurait dépassé un niveau. Ici encore, la cellule de Birmingham semble s’être inspirée du travail d’autres jihadistes à travers le monde.

En troisième lieu, quelques témoignages ont permis de renforcer l’importance de la socialisation dans l’univers du terrorisme, comme expliqué dans un article précédent. Parviz Khan, sensibilisait son fils âgé de cinq ans à l’idéologie d’al-Qaïda. Dans un enregistrement clandestin obtenu par les services de renseignement britanniques, Khan est entendu demander à son fils « Qui aimes-tu ? ». « J’aime le cheikh Oussama ben Laden », répond l’enfant. « Qui veux-tu tuer ? », continue Khan. Et l’enfant de dire : « Je veux tuer l’Amérique, Bush et Blair ».

Enfin, notons qu’une grande partie des informations qui ont permis de juger les membres de la cellule de Birmingham provenait d’enregistrements clandestins du MI5, les services de renseignement sur le territoire britannique.

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