«Rien n'est plus facile que de dénoncer un malfaiteur; rien n'est plus difficile que de le comprendre» ---Fédor Dostoïevski

vendredi 4 avril 2008

Débat sur les Civils en Période de Guerre

« Le sort des civils pendant la guerre est souvent négligé par la littérature scientifique », a reconnu Marc Lynch, auteur de l’excellent blog Abu Aarvark, lors du discours d’introduction pour un débat qui se tenait ce vendredi à la George Washington University concernant les victimes civiles de la guerre. « Il existe une littérature abondante sur les causes de la guerre et aussi sur les solutions, mais très peu d’études se penchent sur la conduite de la guerre, ce qui comprend le traitement de la population civile », a dit Paul Huth, professeur à l’université de Maryland.




















Paul Huth, Colin Kahl et Marc Lynch débattent à la George Washington University.

Paul Huth étudie en ce moment les raisons qui poussent certains gouvernements à tuer délibérément des civils pendant des conflits interétatiques (les guerres civiles étant l’objet d’autres études). Selon lui, les guerres ayant fait un grand nombre de victimes civiles délibérées sont extrêmement rares. Généralement, les guerres font beaucoup plus de victimes délibérées parmi les soldats que parmi la population civile. Trois facteurs, selon Paul Huth, accroissent le nombre de victimes civiles délibérées : le type de guerre (les opérations de contre-insurrection tuent davantage) ; l’objectif de la guerre (les guerres de conquête sont plus meurtrières) ; et la durée de la guerre (plus la guerre est longue, plus il y a de victimes).

Pourquoi tuer délibérément des civils ? Deux raisons : mettre fin à la guerre lorsque les moyens militaires ont échoué, et réduire le coût de la guerre. Finalement, dit Huth de manière assez pessimiste, « il semble que les normes internationales n’aient aucun pouvoir restrictif sur les tueries de la population civile ».

Colin Kahl, professeur à Georgetown University et spécialiste des opérations américaines en Irak, a relayé le débat qui entoure l’estimation des victimes civiles en Irak depuis 2003. L’organisation Iraq Body Count estime le nombre de morts violentes parmi la population depuis 2003 à 90.000. Selon Kahl, « il est fort probable que ce nombre soit bien en dessous de la réalité ».

Cependant, explique Kahl, les Etats-Unis ne sont pas responsables pour toutes ces morts. Il estime entre 10.000 et 20.000 le nombre de civils tués par les Américains lors d’opérations, ou d’échanges de tirs. « Ce nombre peut paraître élevé, dit Kahl, mais en comparaison avec d’autres conflits similaires, cela reste 100 fois inférieur aux Russes en Tchétchénie et 10 fois inférieur au Vietnam ». Colin Kahl conclut en disant que cela reflète un apprentissage des Américains au niveau tactique et stratégique de l’importance de la protection de la population civile.

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