Un rapport publié par la NEFA Foundation la semaine dernière affirme avoir mis à jour « une infrastructure belge des Frères Musulmans plus élaborée que ce qui était connu précédemment ». Il ne s’agit pas là d’une petite affirmation, et je me suis donc attelé avec attention à la lecture du document…pour réaliser que l’affirmation est exagérée. Le rapport reste intéressant, néanmoins, parce qu’il souligne quelques points importants de la stratégie contre-terroriste belge.
Les Frères Musulmans ont été présents en Europe depuis les années 1960. En Allemagne d’abord, avant de s’étendre à l’ensemble de l’Europe. « La Belgique est devenu un important centre pour les Frères Musulmans en Europe », affirme la NEFA.
Trois raisons expliquent la présence des Frères Musulmans en Belgique, selon la NEFA : une importante concentration de musulmans (puisque les Frères sont orientés vers la prêche et la conversion) ; la présence d’institutions européennes (pour le lobbying) ; et le fait que la Belgique est le dernier pays européen à ne pas avoir condamné la branche locale du Hamas palestinien. C’est précisément ce dernier point qui est, selon moi, le plus intéressant et sur lequel je vais un peu m’attarder. En effet, une grande partie du rapport tente (sur base de beaucoup de suppositions) de reconstituer le réseau des Frères Musulmans en Belgique. Mais les seuls organes et individus mis à jour par la NEFA semblent tout ce qu’il y a de plus commun, d’autant plus que certaines de ces organisations ont reçu un statut officiel des Nations Unies, de la Commission européenne et du Conseil de l’Europe. Le deuxième point, le lobbying, fait partie du jeu démocratique également, et donc est largement positif.
La branche belge du Hamas, Al-Aqsa Humanitaire (à différencier des brigades des martyres d’al-Aqsa), a été créée en septembre 1993. Elle avait des liens avec les branches établies plus tôt en Allemagne et aux Pays-Bas. Le but de l’organisation était de lever des fonds pour supporter les actions humanitaires en Palestine. Cependant, peu à peu, des voix s’élèvent dans différents pays contre les organisations liées au Hamas, accusées de supporter les actions politiques et terroristes du Hamas, et non les actions humanitaires. En 1998, un rapport allemand dit que la branche allemande d’al-Aqsa « via les dons humanitaires en Palestine supporte les objectifs du Hamas, indirectement mais efficacement ». Après le début de la seconde intifada et surtout après le 11 septembre, les pressions allemandes sur al-Aqsa s’accroissent et se confirment en 2002 avec l’interdiction d’al-Aqsa en Allemagne et l’annonce par le ministre de l’Intérieur que les fonds d’al-Aqsa servaient à rémunérer les familles des terroristes kamikazes.
Al-Aqsa aux Pays-Bas a été banni en 2003. En mai 2003, les gouvernements américains et britanniques désignent la fondation al-Aqsa, y compris la branche belge, comme organisation terroriste. En octobre 2004, le Département américain du Trésor déclarait que la branche belge d’al-Aqsa était liée à l’Islamic African Relief Agency, une organisation accusée de financer al-Qaïda et le terrorisme palestinien. En décembre 2004, un nouveau rapport d’une Cour allemande souligne que al-Aqsa, y compris la branche belge, finance le terrorisme palestinien, via un fond britannique. Et pourtant, à ce jour, la Belgique n’a toujours pas interdit al-Aqsa, ce qui permet au groupe de poursuivre ses activités au grand jour.
En 2006/2006, Al-Aqsa Humanitaire a changé de nom pour AKSAHU. Selon les autorités belges, c’était pour éviter la confusion avec les brigades des martyres d’al-Aqsa. Selon la NEFA, cela serait dû à des difficultés croissantes de transfert de fonds à cause de la surveillance américaine accrue. AKSAHU a un bureau à Molenbeek, et un autre à Verviers.
En conclusion, le rapport de la NEFA pose une question à laquelle il faut une réponse claire : Pourquoi la Belgique n’a-t-elle pas pris des mesures contre al-Aqsa, alors que d’autres pays l’ont fait ? Il me semble qu’une enquête poussée sur le groupe, ses agissements, et ses mouvements financiers serait de rigueur.
La Belgique a souvent montré une position relativement modérée vis-à-vis du Hamas palestinien, avec une certaine réticence à considérer le groupe comme mouvement terroriste. Est-ce là la raison du manque d’action contre al-Aqsa ? Le groupe n’a-t-il vraiment aucun lien avec le terrorisme ? Il est temps d’avoir des réponses claires. Car il serait mal vu pour la Belgique, qui se défend haut et fort d’être une plaque tournante du terrorisme en Europe, d’être reconnue coupable d’un manque d’action dans la lutte contre le terrorisme.
«Rien n'est plus facile que de dénoncer un malfaiteur; rien n'est plus difficile que de le comprendre»
---Fédor Dostoïevski
mardi 22 avril 2008
Le Hamas et les Frères Musulmans en Belgique
Publié par Europe in the World à 00:59
Libellés : Europe, Islamisme, Terrorisme
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